Les mélomanes s’interrogent, les labels tremblent et les plateformes de streaming comptent leurs milliards de données. Depuis 2022, l’intelligence artificielle s’est immiscée partout dans la musique : dans les logiciels de composition, les algorithmes de recommandation, et même dans les « artistes fantômes » qui caracolent en tête des playlists sans exister réellement grâce à des agents IA qui simulent des écoutes. Alors, l’IA est-elle une alliée créative… ou une menace pour l’art musical ?

Quand l’IA dope la créativité

Côté pile, l’IA ouvre des horizons vertigineux. Des outils comme Suno ou Udio exploitent le machine learning sur d’immenses catalogues musicaux pour générer une chanson en quelques minutes. Le mastering automatisé (LANDR, iZotope) s’appuie sur des réseaux neuronaux capables d’optimiser niveaux et fréquences comme le ferait un ingénieur du son chevronné. Résultat : une qualité sonore « studio » à portée de clic.

Les musiciens s’en servent déjà comme copilotes créatifs. Des IA embarquées dans les DAW (stations audio-numériques) analysent en temps réel la piste et suggèrent variations, ponts ou modulations. Même la pédagogie s’y met : grâce à la reconnaissance audio, des applis comme Yousician évaluent la justesse d’un élève note par note et adaptent son parcours d’apprentissage en fonction de ses faiblesses.


CNM - Etude IA & Musique (2025) voir lien ci-bas

Quand l’IA est au service de l'argent

Mais le revers technologique inquiète. Chaque jour, ce sont 30 000 nouveaux morceaux générés par IA qui arrivent sur les plateformes comme Spotify ou Deezer. Derrière, des modèles génératifs exploitent des GPUs ultra-puissants et des bases de données d’entraînement souvent composées de catalogues existants, parfois sans autorisation. Résultat : une inflation de titres qui menace la visibilité des artistes humains.

Les plateformes elles-mêmes flirtent avec l’ambiguïté : certaines auraient déjà intégré des «artistes fantômes» créés par IA dans leurs playlists, histoire de réduire les royalties versées aux ayants droit. Même la forme des chansons est dictée par la data. Comme Spotify ne rémunère une écoute qu’après 30 secondes, les producteurs calibrent leurs morceaux : intro minimale, refrain dès la 10ᵉ seconde. En 1990, un tube durait 4 min 22 ; en 2024, la moyenne est descendue à 3 min 34.

Vers une nouvelle éthique de l’écoute

Amour ou haine ? La vérité est qu’il faudra apprendre à vivre avec cette musique algorithmique. L’IA n’est pas l’ennemie, mais un amplificateur : elle peut démocratiser la création autant qu’elle peut l’uniformiser. Elle peut enrichir la pédagogie musicale autant qu’elle peut dévaloriser le travail des auteurs.

L’IA a déjà changé la musique, et ce n’est qu’un début. Mais elle ne remplacera pas ce que seul l’humain sait transmettre : l’émotion brute, la fragilité, l’imprévu. Si nous, auditeurs, adaptons nos pratiques, en consommant de manière plus consciente et plus exigeante, l’IA restera un outil au service de la créativité. Sinon, nous risquons de laisser la musique devenir un simple flux de données optimisé pour l’algorithme.

Sources :

https://www.theguardian.com/music/2025/sep/25/spotify-removes-75m-spam-tracks-past-year-ai-increases-ability-make-fake-music

https://www.huffingtonpost.fr/culture/article/comment-deezer-repere-les-musiques-generees-par-ia-et-les-signale_251605.html

https://arxiv.org/abs/1903.06008

Une étude très intéressante: https://cnm.fr/wp-content/uploads/2025/06/20250617_CNM_Cartographie-IA_Etude-complete_VF.pdf

Autre étude sur le droit d'auteur et l'IA : https://media.francedigitale.org/app/uploads/prod/2024/12/10105902/IA-ge%CC%81ne%CC%81rative-et-droit-dauteur-France-Digitale.pdf


Retrouver l'article de Vincent Charlier?
C'est ici: son article LinkedIn


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